Il existe une certaine confusion associée à la terminologie "amiante" entretenue par les difficultés d’identification des différentes fibres. En effet, plusieurs silicates peuvent se présenter sous deux formes : asbestiformes et non asbestiformes.

Le minéral asbestiforme et son équivalent non asbestiforme ont la même composition chimique, mails ils diffèrent par leur mode de croissance cristalline, unidimensionnel pour les minéraux asbestiformes et "tridimensionnel" pour les minéraux non asbestiformes (ANSES, 2015).
Veine d'actinolite-amiante

Veine d'actinolite-amiante

© BRGM, Didier Lahondère

Amiante, fibre asbestiforme

L’Agence américaine de protection de l’environnement (US EPA) a recommandé en 1993 (EPA, 1993) une définition de la morphologie d’un minéral asbestiforme (traduction libre, ANSES, 2015) :

"Un minéral qui est comme l’amiante, c’est-à-dire cristallisé dans une morphologie d’amiante. Certains minéraux asbestiformes peuvent ne pas avoir les qualités qui donnent à l'amiante sa valeur commerciale, telles que la longueur des fibres et la haute résistance à la traction. En microscopie optique, la morphologie asbestiforme est généralement reconnue par les caractéristiques suivantes :

  • Le rapport d’allongement (longueur/diamètre) varie de 20:1 à 100:1 (ou supérieur pour des fibres de longueur supérieure à 5 μm) - (L/D) > 20. Les rapports d’allongement doivent être déterminés pour les fibres et non pour les faisceaux.
  • Fibrilles très fines, (diamètre inférieur à 0,5 μm). 

Et par deux caractéristiques ou plus parmi les suivantes :

  • Fibres parallèles regroupées en faisceaux.
  • Faisceaux de fibres avec des extrémités effilochées.
  • Agglomérats de fibres individuelles enchevêtrées.
  • Fibres incurvées."
Fibres de chrysotile

Fibres de chrysotile vues au microscope électronique à balayage

© BRGM

Le terme "asbestiforme" fait référence à une morphologie provenant d‘une cristallisation naturelle et unidimensionnelle d’un minéral donnant des fibres ayant l‘apparence de cheveux (fibres longues et filiformes).

C'est cette morphologie qui confère au minéral ses caractéristiques particulières :  rapport d’allongement élevé, propriétés mécaniques accrues (dont la résistance, la flexibilité et la durabilité).

Ces fibres sont rassemblées dans des agglomérats ou des faisceaux pouvant facilement se séparer en plus petites fibres (fibrilles). Cet effet est à la base de la terminologie "polyfilamenteux" qui correspond à la caractéristique la plus importante de l’amiante (MSHA, 2005). Quand une pression est appliquée sur une fibre asbestiforme, elle plie plutôt qu'elle ne se brise.

Le terme "asbestiforme" n’a pas été défini pour des besoins réglementaires, il dépend du processus de croissance du cristal.

Actinolites prismatiques

Actinolites prismatiques, homologues des actinolites-amiantes, Haute-Corse

© BRGM, Charlène Coutin

Minéraux homologues et notion de fragments de clivage

Chaque variété d’amiante possède un homologue non asbestiforme dont la composition chimique est la même que la sienne mais dont le mode de croissance diffère.

Les variétés minérales non asbestiformes se développent de façon bi ou tridimensionnelle, donnant lieu à une morphologie plus massive.

Amiante et leurs homologues

Amiante et leurs homologues

BRGM

Fragments de clivage de trémolite (homologue)

Fragments de clivage de trémolite (homologue non amiantifère de la trémolite-amiante)

©BRGM

Lorsqu’une contrainte mécanique est appliquée sur les minéraux non asbestiformes, ceux-ci se fracturent en particules plus ou moins allongées appelées "fragments de clivage".

La fragmentation de minéraux non asbestiformes peut provenir de contraintes mécaniques :

  • naturelles. Par exemple, sous l'action de l'eau ou du vent.
  • anthropiques. Lors de sollicitations mécaniques des roches et du sol.

 

Les fragments de clivage peuvent se distinguer par les caractéristiques suivantes :

  • Ils sont plus courts et larges que les fibres asbestiformes.
  • Leurs rapports d'allongement sont donc plus faibles.
  • Les bordures et terminaisons sont moins régulières.
  • La population de particules fibriformes est hétérométrique.

Certaines particules sont aciculaires (en forme d’aiguilles) et le clivage en escalier sur les côtés de certaines particules est commun.

Morphologie des particules

Schéma de comparaison de la morphologie des particules

ANSES

Actinolites minérales prismatiques dans des métabasaltes, Volpajola, Haute-Corse

Actinotes minérales prismatiques dans des métabasaltes, Volpajola, Haute-Corse

© BRGM, Charlène COUTIN

Implication réglementaire

Les méthodes analytiques actuelles ne permettent pas toujours de distinguer de façon simple les fragments de clivage des fibres d’amiante

Aussi, certains fragments de clivage sont donc susceptibles d’être comptabilisés comme fibres d’amiante lors des analyses réalisées en laboratoire. Cela concerne les fragments de clivage des minéraux homologues à des amiantes réglementés, à savoir :

  • l’actinolite ;
  • l’anthophyllite ;
  • la trémolite ;
  • la grunérite ;
  • la riébeckite.

C'est le cas notamment lorsque les dimensions d’un fragment de clivage entre dans celles définies par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) (L > 5 µm, D< 3 µm, L/D > 3), qui cadrent réglementairement les limites des particules susceptibles d’être inhalées.

L'ANSES a publié en 2015 une représentation graphique des différentes particules minérales (PMA) en fonction de leur morphologie et de leurs dimensions.

PMA - PMAi - Morphologie

Représentation graphique des particules minérales en fonction de leur morphologie et de leurs dimensions

ANSES, 2015

 

Panneau protection obligatoire des voies respiratoires

Panneau pour la protection obligatoire des voies respiratoires

Signalétique usuelle

Quelles règles appliquées pour les fragments de clivage ?

Au laboratoire

Les caractéristiques dimensionnelles des cristaux d’actinolite identifiés réglementairement sont discutées en fonction des critères morphologiques précisés dans les normes NF ISO 22262-1 et NF X 43-050.

Cependant, la réglementation permet l’identification de l’espèce et de la forme minérale (asbestiforme vs non asbestiforme) à travers l’utilisation de techniques analytiques complémentaires aux analyses classiques.

Notamment, en complément des analyses standards, la réalisation de lames minces polies issues de doublons d’échantillons (avant broyage). Ces lames minces permettent de conserver la structure initiale de la roche et d’observer précisément la morphologie des amphiboles présentes.

 

En pratique lors des travaux

Dans le cas des fragments de clivage, la DGT a publié une note le 9 juillet 2018, précisant que "les fragments de clivages issus de variétés amphiboles (homologues non amiantifères) ne sont pas visés par l’interdiction de l’amiante posée par le décret du 24 décembre 1996. Ils n’entrent donc pas dans le champ d’application de la 'réglementation amiante' qui ne vise que les six substances définies réglementairement comme étant de l’amiante".

Dans ce cas, la DGT propose de se référer aux dispositions de la réglementation pour les agents chimiques dangereux (ACD) et agents chimiques dangereux cancérogènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction (CMR), notamment relatives à la silice cristalline alvéolaire. Elles permettent la mise en œuvre de mesures de prévention collectives et individuelles adaptées.

En l’occurrence, une évaluation des risques devra être établie. Elle permettra de cadrer les mesures à mettre en place afin de protéger les travailleurs d’une éventuelle exposition aux poussières cancérogènes.